Le Mans : Magique, pour toujours
4h30, vendredi 15 juin.
Le réveil sonne. Je n'ai pas fermé l'oeil de la nuit. C'est aujourd'hui que commence le plus beau week-end de l'année. J'attrape mon sac, je saute dans mes vêtements préparés depuis 2 jours déjà, je démarre ma Clio qui semble déjà rugir d'impatience avec moi ( tant que le peut une Clio. ) A 6h20, l'avion décolle en direction de Paris. A 9h40, je suis dans le train en direction de Nantes. 1er arrêt, Le Mans, il est 11h20. Je saute du train, flottant dans l'euphorie qui précède chaque année ce week-end magique.
La journée se déroule entre prise de contact avec les équipes, repérages des changements par rapports aux années précédentes, retrouvailles annuelle avec les photographes, journalistes, mécaniciens, passionnés assidus.
L'ambiance est décontractée, tout est encore calme sur la piste, et peu à peu, on sent monter l'excitation, ce petit truc, ce je-ne-sais-quoi qui nous laisse tous rêveurs en pensant au lendemain.
Le samedi, plus question de décontraction. Tout le monde s'affaire, chacun joue la chorégraphie qu'il a répétée maintes et maintes fois en amont de ce grand jour. Rien ne peut être laissé au hasard. Les regards sont vifs, concentrés, les sourires quelques peu tremblants parfois, les esprits sont tournés vers le départ de cette 86eme édition des 24 heures du Mans.
La tension monte encore d'un cran lors de la mise en grille.
La foule envahie la grille de départ, essayant de capter un sourire, un regard, analysant chaque voiture, détaillant chaque équipage, les performances réalisées lors des qualifications, se pressant autours de la Toyota n°8 Nakajima/Buemi/Alonso et des 59 autres voitures engagées de cette course mythique sur le point d'être lancées à pleine vitesse durant 24heures.
Le silence se fait dans la Sarthe. La Marseillaise s'élève, entonnée à pleins poumons par les dizaines de milliers de spectateurs venus assister à cet évènement incontournable et unique au monde. Les pilotes sont alignés aux côtés de leurs équipes, émus, concentrés, fiers.
A 15h, Rafael Nadal abaisse le drapeau tricolore sur les 60 machines qui rugissent et s'élancent, dévorant la piste avec avidité, et l'on sent dans cette atmosphère tellement particulière toute l'énergie et la tension qui se déversent d'un seul coup sur le circuit du Mans. Comme chaque année, j'ai les larmes aux yeux et des frissons dans les stands alors qu'au dessus de nous la patrouille de France tend dans le ciel l'éternel sillage Bleu Blanc Rouge.
Nous y sommes, les 24heures sont lancées. 24 heures à sillonner la pitlane, de long en large, de haut en bas, visitant chaque box, capturant les instants, les émotions. Ces moments de passion, partagés entre tous, pilotes, mécaniciens, journalistes, photographes, spectateurs. Je capture sans prendre le temps de respirer parfois, en apnée dans l'arène, surveillant mes arrières, les voitures s'arrêtent à tour de rôle dans un flot continu, repartant à tout allure après seulement quelques secondes.
Même après 5 années, dont 4 équipée en pitlane, je suis toujours autant impressionnée, et consciente du danger omniprésent autours de moi.
La nuit tombe peu à peu, laissant place à la magie propre aux 24heures. Car c'est bien la nuit que se vit Le Mans. Tout y prend une autre dimension. La pitlane se désengorge peu à peu, seule une poignée de journaliste reste en chasse autours des box. La ronde des ravitaillements et des arrêts au stand elle, continue inlassablement.
Chaque équipe reste concentrée, organisée, prête à tout pour emmener leur voiture au bout de cette course infernale. Les pilotes se relayent, poussant un peu plus chaque tour, escaladant les vibreurs, imposant un rythme d'enfer aux machines qui se noircissent, ramassant les débris de gomme et les insectes malheureux qui s'encastrent sur les pares brises et les sponsors au fil des heures.
Au matin, la fatigue se lit sur les visages. Certains s'endorment, d'autres luttent pour ne rien louper du spectacle. La nuit est passée, le circuit reprend des couleurs, et les voitures filent toujours sans s'arrêter.
15h, dimanche 17 juin.
Le drapeau à damier virevolte sur le doublé Toyota.
A quelques mètres de la piste, les larmes montent, la pression retombe, la joie éclate dans les box après 24 heures de combat contre cette épreuve impitoyable. Ils ont vaincu Le Mans. Ensemble.
En remontant la pitlane jusqu'au pied du podium, comme chaque année, une larme s'échappe.
Quelques heures plus tard, un calme troublant. Sommes-nous au même endroit? Le bourdonnement des moteurs, les commentaires du Speaker, le brouhaha des spectateurs... Tout a disparu. Les campements se démontent, une file interminable de véhicules se forme à la sortie du circuit.
Plus que 365 jours avant le départ de la 87ème édition des 24 Heures du Mans.
Prendrez-vous part à l'aventure ?